INTRODUCTION
Écrire un ouvrage sur l’économie africaine est une tâche délicate pour deux raisons principales. Comment présenter l’essentiel alors que, même si on se limite à l’Afrique subsaharienne (ASS), le sous-continent est une terre de contrastes ? Le terme Afrique désigne, dans l’ouvrage, l’Afrique subsaharienne, y compris l’Afrique du Sud. Neuf grandes régions apparaissent (cf. carte et tableau I, p. 4 et 7). Sur 48 pays, 35 ont moins de 10 millions d’habitants et 15 sont enclavés.
Or, le PIB de l’ASS est de l’ordre de celui des Pays-Bas ou du Mexique (370 milliards de dollars en 2003). Regroupant près de 700 millions d’habitants en 2003, l’Afrique représente 10 % de la population mondiale,
1 % du PIB, 1,3 % des exportations et moins de 1 % de la valeur ajoutée industrielle du monde. La part de l’Afrique continentale dans le PIB mondial, exprimée en parité des pouvoirs d’achat, a diminué d’un tiers entre 1950 et 2000. Sa part dans les exportations mondiales a été divisée par trois (BAD, OCDE, 2002).
L’ASS représente 58 % du PIB africain (38 % sans l’Afrique du Sud). La seconde raison est plus fondamentale.
S’agit-il d’appliquer les outils d’analyse économique à ce continent ou de questionner les catégories économiques à partir des particularités africaines ? Y a-t-il une spécificité africaniste pour un économiste
et une légitimité de l’économie pour un africaniste ?
Un économiste doit-il privilégier la longue durée des régimes d’accumulation et des crises ou les cadres de cohérence des équilibres (ou des déséquilibres) des marchés par le jeu des prix (ou des quantités) ?
Selon nous, l’économie du développement n’est pas seulement l’application à un champ particulier des outils d’analyse économique universels (gestion de la rareté, allocation des ressources sous contraintes…) ; elle est aussi un questionnement de ces outils obligeant à ouvrir la « boîte noire » des structures sociales et à avoir le regard de la longue durée. Le cadrage macroéconomique, nécessaire à la mise en cohérence, doit être resitué dans une perspective historique (première partie) ; l’analyse microéconomique, permettant de comprendre le comportement des agents, doit être liée aux organisations et aux institutions (deuxième partie); les débats de politique économique doivent prendre en compte la pluralité des trajectoires et les enjeux en cours permettant de définir plusieurs perspectives (troisième partie).